| J’sais pas pourquoi, ce matin, je suis très en colère
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| Mais je laisse rien paraître devant ma fille et sa mère
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| Bisous, «Bonjour», ennui, cafetière
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| La jolie vaisselle que nous a donnée grand-mère
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| J’aimerais tout foutre en l’air, ouais, j’y pense, des fois
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| Les jours se ressemblent comme ma fille et moi
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| «Allez chérie, dépêche-toi, on va être en retard
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| Dis «Bonjour» aux voisins; |
| au revoir, connard"
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| Toujours bloqué dans la circulation
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| Stimulation, agression, allez, avance, pauv' con
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| «- Qu’est-ce qu’il t’arrive, papa, dis-moi pourquoi tu t'énerves»
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| Je l’entends pas, aujourd’hui,
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| j’suis coincé dans un rêve
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| «Allez mon ange, sois sage et passe une bonne journée»
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| Ma propre hypocrisie commence vraiment à me soûler
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| Youhou ! |
| Maintenant, direction l’taf, l'éclate
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| Un lapin dans un clapier, huit heures derrière un clavier
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| Ça fait deux semaines que j’essaye de parler à mon patron
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| Je l’imagine souvent, le soir, découpé dans des cartons
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| «- Monsieur, pour mon augmentation…
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| — On en parlera plus tard»
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| Dire que ça fait quinze ans qu’j’enfile ce putain d’costard
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| Après, j’irai chercher ma fille,
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| comme toujours
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| Je ne vois que l’ennui, où est passée ma vie?
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| Où est passé l’amour?
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| Ce soir, la même bouffe de supermarché
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| Haricots verts, steak haché,
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| on fera semblant d’pas s’fâcher
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| Mais j’ai encore trouvé des textos dans son téléphone
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| C’est pas la fin du monde, ça fait deux ans qu’elle me trompe
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| Moi, comme d’hab', je dis rien, non, comme d’hab', je suis aphone
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| Ce monde est trop pourri pour ma fille
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| , j’ai honte
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| La routine, le premier jour comme le dernier
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| Attends, mais y’a pas un fusil dans le grenier?
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| Le taf, l’angoisse, la ville, l’ennui, le temps qui passe, routine, l’ennui
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| L’amour, la mort, les rêves, l’envie, photo, sourire, encore la ville
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| Le stress, le noir, les larmes, les cris, les klaxons, les sonneries
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| Je crois que, ce soir, je vais faire une connerie
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| Seul dans l’ombre, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’avance, je tombe, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’ai jeté l'éponge, comme monsieur tout l’monde
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| Je plonge dans le plus sombre de mes songes
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| Seul dans l’ombre, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’avance, je tombe, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’ai jeté l'éponge, comme monsieur tout l’monde
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| [Pont 1:
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| Un inspecteur de police
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| & Oli]
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| — Bonsoir
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| — Bonsoir
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| — Nous aurions quelques questions à vous poser au sujet d’l’incident d’hier soir
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| — Oui
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| — Vous connaissiez l’voisin?
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| — Oui, oui…
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| — Qu'est-ce que vous pouvez nous raconter sur lui?
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| — Sur lui?
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| J’suis encore sous l’choc étant donné qu’c'était un père
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| Exemplaire, voisin charmant, attentionné, un type normal, non, rien de louche
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| Qui ferait même pas de mal à une mouche, j’l’entendais chanter sous la douche
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| Il m’aidait à descendre mes courses
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| Un gars ordinaire, discret, sans histoire
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| Y’a ma maison à la télé, tout ça: difficile d’y croire
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| À la radio, c’est dingue, ils parlent de flingue, de rideaux en sang
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| Dire qu’on avait passé le dernier nouvel an ensembles
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| On parlait bricolage autour d’un verre, trinquant à notre santé
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| Un monsieur tout l’monde, et personne n’s’y attendait
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| [Pont 2:
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| Un inspecteur de police
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| — Et à propos d’l’incident? |
| Vous pouvez nous raconter c’que vous avez entendu?
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| C’que vous avez vu?
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| Il a tué sa fille et sa femme, 'fin, sa femme en premier
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| On parle de fusil et d’idées noires dans l’fond d’son grenier
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| J’entends encore le bruit des cris: c’est pire à chaque seconde
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| Trois tombes pour un monsieur tout l’monde
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| Voisin assassin appuyant quatre fois sur la gâchette
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| Les volets fermés, oui, l’drame s’est passé en cachette
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| J’ai entendu un «bam», on venait de quitter la table
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| Vingt-deux heures trente-deux, une balle: celle qui a tuée sa femme
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| Ils s’fâchaient pas mal, j’ai pensé à une dispute banale
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| S’enchaîne un coup machinal, le calme, puis la balle finale
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| Un coup d’fil: la police débarque, les chaînes télé défilent
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| On m’demande des infos sur le barge, un peu comme dans les films
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| On a retrouvé l’corps de sa fille tout près du sien
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| Dire qu’j’ai vu c’type pleurer à la mort de son chien
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| Ma femme ne parle plus depuis qu’elle a su la nouvelle |
| Elle a croisée son regard, hier soir, en sortant la poubelle
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| Toujours souriant, un gars sympa qui habitait à deux pas
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| J’suis sûr qu’les autres voisins disent la même chose de moi
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| Il me ressemble:
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| la voiture, la femme, la belle-mère, les soirées à table
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| Le canapé, les films banals, le pain pour l’canard du canal
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| Le chien, le putain d’nain d’jardin, la terrasse au soleil
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| Qu’est-ce qui m’empêcherait de faire pareil?
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| Seul dans l’ombre, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’avance, je tombe, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’ai jeté l'éponge, comme monsieur tout l’monde
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| Je plonge dans le plus sombre de mes songes
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| Seul dans l’ombre, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’avance, je tombe, j’suis qu’un monsieur tout l’monde
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| J’ai jeté l'éponge, comme monsieur tout l’monde
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| Je plonge dans le plus sombre de mes songes
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| J’sais pas pourquoi, ce matin, je suis très en colère
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| Mais je laisse rien paraître devant ma fille et sa mère
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| Bisous, «Bonjour», ennui, cafetière
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| La jolie vaisselle que nous a donnée grand-mère
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| J’aimerais tout foutre en l’air |