Il y a tellement longtemps
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Que je n’avais pris votre rue
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La dernière fois, il y a mille ans
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Et je n'étais plus revenue
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C’est drôle, il m’est venu l’idée
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De découvrir quelle passante
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Parmi celles que j’ai croisées
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Allait chez vous comme une amante
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Je l’ai bien vite reconnue
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Elle marchait trop lentement
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Et d’une allure retenue
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Pour dompter son corps impatient
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Sous les tilleuls de l’avenue
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Comme je l’ai fait, il y a longtemps
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Elle profitait en promeneuse
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De chaque pas qui mène à vous
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Le cœur battant, la mine heureuse
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Et sifflotant comme un marlou
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Elle imaginait votre chambre
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Votre divan et puis vous deux
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Dans le jeu où les corps se cambrent
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Le rose aux joues, les reins en feu
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Il m’a suffi de voir ses yeux
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Pour y retrouver, frémissant
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Le goût des voyages amoureux
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Des projets plutôt indécents
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Et des songes voluptueux
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Que je faisais, il y a longtemps
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Elle a grimpé vos quatre étages
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D’un seul élan, déjà offerte
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Repris son souffle et son courage
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Et poussé la porte entrouverte
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Elle savait le scénario
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Et le décor et les effets
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L’odeur de la menthe, les volets clos
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L’invitation du lit défait
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Elle savait que le désir
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Serait le maître du moment
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À l’heure où rien ne doit se dire
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Qui ne soit mensonge ou serment
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L’heure des ivresses et des plaisirs
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Que j’aimais tant, il y a longtemps
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Elle a disparu sans savoir
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Que je l’enviais en la suivant
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Elle est au ciel jusqu'à ce soir
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Dans les éthers et le néant
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Et si ce n’est pas pour toujours
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Qu’elle est heureuse, la belle enfant
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Comme elles sont douces, ces amours
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Ces amours sans engagement !
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Elles ne durent guère plus que le jour
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Mais le beau jour, assurément
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Elles ne durent guère plus que le jour
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Ah ! |
Le beau jour, assurément ! |