Cette antichambre du tombeau où froissent comme des drapeaux
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Les draps glacés par la tempête
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Ce tabernacle du plaisir avec la porte du désir
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Battant sur l’ennui de la fête
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Cette horizontale façon de mettre le coeur à raison
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Et le reste dans l’habitude
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Et cette pâleur qu’on lui doit, dès que l’on emmêle nos doigts
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Pour la dernière solitude
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Le lit, fait de toile ou de plume, le lit, quand le rêve s’allume
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Cette maison du rêve clos sur le grabat, dans le berceau
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Au point du jour ou de Venise
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Cette fraternité de nuit qui peut assembler dans un lit
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L’intelligence et la bêtise
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Qu’il soit de paille ou bien de soie, pour le soldat ou pour le roi
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Pour la putain ou la misère
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Qu’il soit carré, qu’il soit défait, qu’importe lorsque l’on y fait
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Autre chose que la prière
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Le lit, enfer pavé de roses, le lit, quand la mort se repose
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Qu’il soit de marbre ou de sapin, quant au lit qui sera le mien
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Dans le néant ou la lumière
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Je veux qu’on ne le fasse point et qu’on y laisse un petit coin
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Pour un ami que j’ai sur Terre
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Cet ami que je laisserai, quand il me faudra dételer
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Pour l’aventure ou la poussière
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Ce frère de mes longues nuits et que l’on appelle l’ennui
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Au fond du lit des solitaires
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Le lit, quand s’endort le mystère, sans bruit, dans la vie passagère. |